Harkis:une Fondation sous influence militaire.

Publié le par union-harki

Harkis : une  Fondation  sous influence militaire.

 
Par Fatima Besnaci-Lancou, co-fondatrice de l'association Harkis et droits de l'Homme
 
Le 31 mars 2007, le candidat Nicolas Sarkozy déclarait : "Si je suis élu président de la République, je veux reconnaître officiellement la responsabilité de la France dans l’abandon et le massacre de harkis, afin que l'oubli ne les assassine pas une deuxième fois".  Trois ans après, il n’a toujours pas tenu son engagement. Ce 25 septembre 2010, journée nationale d'hommage aux harkis, le gouvernement doit annoncer la création d'une «Fondation pour la mémoire de la guerre en Algérie, des combats au Maroc et en Tunisie », prévue par la loi du 23 février 2005, loi «portant reconnaissance de la Nation et contribution nationale en faveur des Français rapatriés». Cette fondation n’a jamais été demandée par les familles de harkis, elle est même très souvent rejetée. Que vient faire cette annonce lors d'une journée dédiée aux harkis?
 
Lorsque l’association «Harkis et droits de l’Homme» et d’autres rappellent aux hommes politiques l’engagement du chef de l’Etat, ceux qui sont au pouvoir aujourd’hui répondent aussi inlassablement : fondation, fondation, fondation… Une lettre-type, signée par un haut gradé de l’armée en poste à l’Elysée est systématiquement envoyée aux associations qui se rappellent à son bon souvenir. De même, une réponse-type, signée par Hubert Falco, secrétaire d’Etat aux anciens combattants, est utilisée pour (ne pas) répondre aux parlementaires qui, par une question écrite, s’inquiètent de la mise en oeuvre de l’engagement du Président.  De qui se moque-t-on ? Les harkis ont si souvent servi de  pions aux mains du colonisateur et, puis  des nostalgiques de l'Algérie française. Il risque bien d’en aller de même avec une fondation aux mains  des militaires.
 
Certes, Hubert  Falco assure que «la Fondation ne sera l’otage de personne», que les historiens, français et « de toutes nationalités », pourront y travailler, loin de toute pression. Mais trois places du conseil d'administration sont d'ores et déjà réservées à trois associations, qui, ensemble, apportent plus de 60% du budget total : les «Gueules cassées», la Fédération Nationale André Maginot et le Souvenir français, toutes trois présidées par d'anciens généraux de l'armée française ayant combattu en Algérie. Un seul exemple: le vice-président des Gueules cassées, le général Bertrand de la Presle, est signataire du « Manifeste des 521 officiers généraux ayant servi en Algérie », où il est dit : «Nous tenons d'abord à affirmer que ce qui a caractérisé l'action de l'armée en Algérie ce fut d'abord sa lutte contre toutes les formes de torture, d'assassinat, de crimes idéologiquement voulus et méthodiquement organisés.» Quand on connaît les exactions de l’armée française (et celles du FLN), on croit rêver !
 
Aujourd’hui, alors que l’histoire des harkis est mieux connue,  il est temps de passer de la compassion à une vraie reconnaissance, celle de la responsabilité, comme cela a été fait pour d’autres drames humains du 20ème siècle. Drames incomparables les uns aux autres sur le plan collectif, mais aussi douloureux sur le plan individuel.

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